OCDE : la nouvelle donne sur les prix de transfert

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Le 16 septembre 2014, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a rendu publics ses premiers rapports et recommandations dans le cadre de son Plan d’action concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS). C’est à la demande du G20 que l’OCDE a lancé ce projet en 2013 pour répondre aux préoccupations internationales croissantes que suscitent l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices et pour s’attaquer à de potentiels transferts artificiels de bénéfices par des multinationales dans des territoires à faible taux d’imposition.

Le Plan d’action met de l’avant 15 actions à mener sur une période de 2 ans et visant à améliorer la cohérence, la substance et la transparence du régime de fiscalité internationale. ‎Les publications de septembre traitent de 7 de ces actions, donnant notamment des directives sur la documentation des prix de transfert (action 13), dont un modèle de communication d’informations pays par pays largement médiatisé.

Nouvelles directives sur la documentation

Le rapport publié sur l’action 13 contient des normes révisées pour la documentation des prix de transfert et un modèle de communication d’informations pays par pays, lesquels font désormais partie intégrante des Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert. Les nouvelles directives visent à améliorer la transparence de l’information pour les administrations fiscales en leur fournissant des renseignements utiles aux fins de l’évaluation des risques liés aux prix de transfert et à renforcer la cohérence des exigences imposées aux contribuables.

Les directives révisées proposent, à l’égard de la documentation, une structure à 3 volets qui comprend un fichier maître, un fichier local et une déclaration pays par pays.

Fichier maître

Le fichier maître préparé par la société mère du groupe multinational doit donner un aperçu des activités du groupe, de ses politiques en matière de prix de transfert et de la répartition mondiale de ses bénéfices et de ses activités économiques. Il doit être mis à la disposition de toutes les administrations fiscales visées.

Le fichier maître proposé diffère des documents types établis en vertu des normes de documentation actuelles de par son périmètre : il doit présenter un aperçu mondial et doit comprendre une description de la chaîne d’approvisionnement pour les principaux produits et services de la multinationale. Les transactions importantes liées aux actifs incorporels, les transactions financières et les réorganisations d’entreprises doivent également y figurer. Enfin, ce fichier doit renfermer la liste des arrangements préalables en matière de prix de transfert (APP) unilatéraux existants de la multinationale et des autres décisions en impôt liées à la répartition des bénéfices entre les pays, ainsi qu’une brève description de ces arrangements et décisions.

Fichier local

Le fichier local servira à consigner des renseignements détaillés sur les transactions intragroupes importantes. Il constitue un complément au fichier maître et aide à déterminer si le contribuable respecte le principe de pleine concurrence dans une administration donnée. Au nombre des renseignements consignés, mentionnons les informations financières pertinentes relativement à des transactions précises, une analyse de comparabilité ainsi que des renseignements sur la sélection et l’application de la méthode d’établissement des prix de transfert la plus appropriée.

À l’instar des nouvelles règles relatives au fichier maître, les directives pour le fichier local divergent des normes de documentation actuelles. Tout d’abord, le fichier local doit contenir des informations financières et des tableaux de répartition visant à montrer comment les données financières utilisées pour appliquer la méthode d’établissement des prix de transfert peuvent être rattachées aux états financiers annuels. Doivent aussi être consignées dans le fichier local les raisons permettant de conclure que le prix de pleine concurrence a été déterminé pour les transactions compte tenu de l’application de la méthode d’établissement des prix de transfert retenue. Une société doit donc pouvoir étayer l’assertion selon laquelle la politique en matière de prix de transfert ainsi que les résultats réels respectent le principe de pleine concurrence.

De plus, divers types d’ententes doivent être présentés, y compris toutes les ententes intragroupes importantes conclues par l’entité locale ainsi qu’une copie des APP existants et des autres décisions en impôt auxquelles l’administration fiscale locale n’est pas partie et qui ont trait aux transactions contrôlées faisant intervenir l’entité locale.

Communication d’informations pays par pays

La communication d’informations pays par pays constitue une toute nouvelle obligation de déclaration. Contrairement à ce que l’OCDE avait suggéré au départ, les informations pays par pays et le fichier maître doivent être tenus séparément.

La société mère ultime du groupe multinational doit remplir un modèle faisant état de la répartition des revenus, des impôts et des activités du groupe. Plus précisément, le modèle exige que les multinationales déclarent les éléments suivants pour chaque administration fiscale où elles exercent des activités :

  • Revenus (découlant de transactions entre parties liées ou entre parties indépendantes)
  • Profits (pertes) avant impôt sur le revenu
  • Impôt sur le revenu payé (selon la méthode de la comptabilité de trésorerie)
  • Impôt sur les bénéfices comptabilisé (exercice en cours)
  • Capital déclaré
  • Bénéfices accumulés
  • Nombre d’employés
  • Actifs corporels autres que les liquidités

De plus, les multinationales seraient tenues de fournir chaque année dans la déclaration pays par pays la liste des entités résidentes dans chaque administration fiscale, et d’y mentionner leur territoire d’organisation ou de constitution en société et leurs principales activités économiques.

Mise en œuvre

L’OCDE a parachevé ses directives quant au contenu du fichier maître, du fichier local et de la déclaration pays par pays. Il reste à définir le processus de production du fichier maître et de la déclaration pays par pays, ainsi que le mécanisme par lequel les administrations fiscales visées pourront avoir accès aux informations qu’ils contiennent. L’OCDE se penchera sur ces questions de mise en œuvre au cours des prochains mois et devrait publier ses directives au début de 2015.

Même si l’on ne sait pas encore quand ni comment les pays, dont le Canada, mettront en œuvre les nouvelles directives, il est évident que celles-ci représenteront pour les multinationales un important changement quant à la façon de préparer la documentation des prix de transfert. Les sociétés devraient suivre de près les recommandations que formulera l’OCDE au sujet des méthodes de mise en œuvre de ces nouvelles obligations de déclaration, de même que les progrès effectués concernant l’adoption de ces obligations dans les pays où elles exercent leurs activités.

Incidences

Une fois mis en œuvre, les nouveaux principes applicables en matière de documentation des prix de transfert viendront grandement accroître la quantité d’informations à fournir par les multinationales et la transparence exigée de celles-ci, et ils pourraient mettre à rude épreuve les structures fiscales de certaines d’entre elles, particulièrement celles dont l’empreinte fiscale mondiale ne concorde pas avec l’empreinte opérationnelle ou diffère radicalement de celle-ci.

Dans les vérifications des prix de transfert, la documentation constitue la première ligne de défense. Les sociétés devront prendre les mesures nécessaires pour s’assurer de pouvoir produire les informations requises, y compris recueillir les données et mettre en place des processus et des fonctions internes en ce qui concerne la communication d’informations, et en particulier la déclaration pays par pays.

Les multinationales devraient profiter du délai de mise en œuvre des nouvelles directives pour mettre à jour leurs stratégies mondiales en matière de prix de transfert et élaborer un plan détaillé visant à préparer une documentation qui soit conforme aux directives révisées.

Pour le groupe de travail technique sur la fiscalité et les taxes à la consommation de l’Ordre des CPA du Québec

Alfred Zorzi, CPA, CA
Associé, Services de prix de transfert
Ernst & Young s.r.l. / S.E.N.C.R.L.

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