Notion d’importance relative sous les IFRS

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L’International Accounting Standards Board (IASB) a entamé en 2014 des discussions concernant les problématiques provenant de l’application de la notion d’importance relative à la préparation d’information financière selon les IFRS. Rappelons que l’information financière préparée selon les IFRS peut être présentée dans les états financiers et les notes aux états financiers ou dans d’autres documents. Bien que la notion d’importance relative ait toujours existé dans l’environnement comptable mondial, son application est très divergente dépendamment du pays ou de la juridiction où elle était utilisée avant l’application des IFRS et elle continue d’être influencée par la législation locale, comme les règles d’audit et les définitions légales de cette expression.

Au Canada, de façon historique, nous avons souvent utilisé la notion d’importance relative pour juger du caractère significatif d’une omission ou d’une inexactitude dans les états financiers en établissant un « seuil d’importance relative » calculé selon les chiffres provenant des états financiers. Ce seuil, souvent déterminé en conformité avec les normes canadiennes d’audit, ne respecte pas les IFRS. Selon les IFRS, l’importance relative dépend de la nature et/ou de l'ampleur (la taille) de l'omission ou de l'inexactitude. Ce n’est donc pas seulement une détermination quantitative, mais ultimement, il s’agit d’une détermination qualitative. L’importance relative doit donc toujours être appréciée par rapport aux circonstances particulières et en tenant compte de l’utilisateur prévu de cette information financière.

Dans son « Staff Paper » de novembre 2014, le personnel de l’IASB a indiqué que la taille de l’inexactitude prise seule ne répond pas aux exigences des IFRS. Par exemple, ne pas corriger une omission en utilisant comme unique raison que la taille de l’information financière en question est petite ne répond pas aux exigences des IFRS (appelons cela « dissimuler »). Le personnel de l’IASB a également indiqué que la divulgation de trop nombreux éléments d’information individuellement non importants peut également induire l’utilisateur en erreur (appelons cela « noyer le poisson »). Une information financière erronée peut donc autant être une information financière non présentée (omission), que présentée au mauvais montant ou bien présentée au montant qu’il convient, mais sous un mauvais format de présentation. Comment alors faire le bon compromis entre dissimuler et noyer le poisson?

Par analogie, voici des problématiques pouvant être soulevées par l’application de la notion d’importance relative lors de la préparation d’une carte routière :

  • Il est évident que de fournir trop d’informations, comme l’emplacement précis de chaque numéro de porte et le nom du propriétaire résidant à chaque endroit, rendrait la carte inutilisable pour un automobiliste. Par contre, l’omission d’une information qui semble peu importante, comme la présence d’une ruelle peu utilisée, pourrait induire en erreur l’automobiliste de ce secteur et lui faire effectuer un détour non nécessaire.
  • Si la carte routière est préparée sous forme de texte dans un livre de centaines de pages sans aucun graphique, bien que toute l’information possible s’y trouve, est-ce que ce livre serait vraiment utile à l’automobiliste?
  • Est-ce que la carte routière présenterait le même contenu si elle était destinée uniquement aux piétons ou surtout aux automobilistes?

On constate, en faisant le parallèle avec la préparation d’une carte routière, que le préparateur d’information financière doit prendre en compte chacune des informations financières erronées, peu importe sa taille s’il s’agit d’un montant, l’apprécier par rapport aux circonstances particulières et se demander qui pourrait l’utiliser et comment cet utilisateur pourrait être induit en erreur. Une erreur de petite taille peut donc être considérée comme significative selon les IFRS. Inversement, il peut arriver, en théorie, qu’une erreur de grande taille soit considérée comme étant non significative selon les IFRS.

Par exemple :

  • Conciliation du « goodwill » : ne pas fournir cette conciliation, requise sous les IFRS, serait de dissimuler qu’il y a eu des variations du « goodwill ». Fournir trop de détails à propos de variations peu importantes noierait le poisson. Il conviendrait donc mieux de ne fournir qu’une explication sommaire des variations peu importantes, par exemple en fournissant la conciliation suivante : solde de début de période + « autres variations de xx $ » = solde de fin de période.
  • Une information financière pourrait ne pas être importante pour une société à capital fermé puisque le principal utilisateur, le banquier, ne s’en préoccupe pas, comme le nombre précis d’actions émises, dans certains cas. Toutefois, dans un processus d’inscription en bourse, la bourse s’intéresse au nombre précis d’actions. Ainsi, un écart ne serait-ce que d’une seule action sur des centaines de milliers d’actions émises serait important pour la bourse : est-ce que l’action en écart doit être inscrite et admise à la négociation en bourse ou non?

Le préparateur d’information financière se devrait de répondre à chacune des 5 questions énumérées ci-après lorsque vient le temps d’analyser les erreurs. Il serait également bien avisé de consigner les réponses à ces questions dans le dossier supportant l’information financière pour appuyer son jugement professionnel. Dans certaines situations, il peut s’avérer plus efficient d’apporter la correction à l’information financière erronée plutôt que de procéder à sa documentation.

Rappel des questions pertinentes à se poser :

  1. Quelles décisions pourraient être prises à partir de l’information erronée?
  2. De quelle façon est-ce que l’information erronée est utilisée dans la prise de décision?
  3. Est-ce que l’information erronée pourrait modifier la décision prise?
  4. Est-ce que la décision pouvant être prise à partir de l’information erronée est importante?
  5. Que pouvons-nous assumer en ce qui concerne l’utilisateur prévu de l’information erronée?

Le personnel de l’IASB prévoit publier en 2015 un projet de norme d’application de la notion d’importance relative pour la préparation d’information financière sous les IFRS.

Jérôme Minier, CPA auditeur, CA
Membre du groupe de travail technique sur les IFRS

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